PORTRAIT D’UN PARISIEN PRIS DANS LA CABINE PHOTOMATON DU CHAOS PARIS 2016 D.C.
Written by Henrik Aeshna on Sunday the 7th of August 2016
PARIS 2016 D.C.
(PORTRAIT D'UN PARISIEN PRIS DANS LA CABINE PHOTOMATON DU CHAOS -
MAGIC-CITY BLUES) - illustration: Saint Sébastien, par Steve Dalachinsky, NYC/Paris - all rights reserved)
symphonie de grues de travaux de mouettes mécaniques d'aboiements
de totems urbains lampadaires feux rouges & ferrailles se précipitant dans
la savane inondée de la nuit suburbaine, envoûtée de paradoxale solitude - ville
folle - jeunesse délabrée dans une ancienne échoppe topordantesque made in hell
- le verre de rouge incandescent & un morceau post-punk allemand rechutant kaltes
klares wasser ; je
pense à mon road trip panaméricain - je pense au dernier regard de jean seberg
dans à bout de souffle & au beau
cadavre de james dean - je pense au new york de fred mcdarrah ted joans warhol
& lou reed & aux arlequins noirs du 'madame satã' d'une são paulo que j'ai
jamais vécue - je pense au sourire contaminé d'iode infernal & de samba de
la jolie brune d'une chanson de nougaro sur une plage déserte en côtes-d'armor
& à ses flèches d'amour gamahuchant mes trippes - je pense à ses petits
seins comme une pluie de raisins tombant sur ma langue & à chaque détail de
son nu pâle parfumé au sable breton faisant l'amour avec le vent & la brise
d'été - je pense à ses doigts sales/salés enfoncés dans ma bouche & je me
masturbe farouchement - je pense à une phrase d'arthur cravan qui m'est tombée juste
par hasard : « Il faut regarder le monde comme le fait un enfant, avec de
grands yeux stupéfaits : il est si beau. Allez courir dans les champs,
traverser les plaines à fond de train comme un cheval ; sautez à la corde et,
quand vous aurez six ans, vous ne saurez plus rien et vous verrez des choses
insensées. » - je pense à chercher un boulot de merde & j'ai peur,
j'ai souvent tellement peur que je n'arrive même pas à sortir de ma cage, que
par la fenêtre je ne vois qu'une plaque & deux directions: sainte-anne
& bichat, ou alors des faux culs sangsues & néo-gurus psychopathes opportunistes
prêts à enculer le premier paumé venu - alors dans ce cas, je pense
comme tout
le monde, & je pense tout ce que Le Monde me vomit dessus, je pense je
dépense j'achète je m'endette je me vends je pense - je pense trop - je pense
& je ne sais plus qui je suis, je pense donc je ne suis rien - & je
pense au terrorisme, au réchauffement climatique, au cinémassacre, Ã
l'apocalypse meat & à la nouvelle vague d'extrême droite réac' de gauche
partout dans le monde & Ã la nouvelle gauche de droite etc. etc., gauche
& droite comme les deux couilles d'une même queue molle & frigide, les
deux faces d'un même cauchemar KALI YUGA, la tête rasée affreuse de nosferatu
en haut de la tour eiffel, le gros bordel - au fait, je pense tellement au pire
que je pense à la chirurgie esthétique pour changer définitivement de gueule de
sexe de couleur de race d'espèce; que je n'attends qu'une brèche pour m'enfuir
comme mattia pascal de pirandello ou pierrot le fou, mais où, nom de dieu,
fucking buddha ?! c'est tout pourri ! - je pense aux frontières du
monde fermées de plus en plus, la planète comme un énorme
cul-de-sac-poubelle gouvernée de tous les côtés par des vrais tarés en
costard criant GOD BLE$$ AMERICA ou avec des kalichnikov en hurlant ALLAH AKBAR
- NO WAY OUT - I CAN'T ESCAPE MYSELF* - je pense aux portes de la perception renfermées de plus en plus,
devenues cavernes de platon encombrées de putes en plastique & de pokémons,
à l'innocence lucide du petit prince & au bateau visionnaire effréné de
rimbaud piégés-naufragés-écrasés sur l'esplanade pâle & blasée de la
défense sous le soleil grisâtre du midi, ou en parlant tout seul dans la rue, faisant
la manche dans le métro - je pense au grand flâneur beat-situationniste coincé
dans une impasse, fini dans la grosse gueule de bois de michel houellebecq
nouveau darling-zombie des médias - hello kafka, hello orwell, hello tarkovski
- je pense à mes héros morts d'une overdose & à mes ennemis au pouvoir - Ã
alfred panou claquant JE SUIS UN SAUVAGE avec chicago art ensemble dansant sur
la table ronde du gros & sale Miroir Occident Grand Canyon Skywalk, en
recrachant des perles des poisons des pierres philosophales du fond de son
whiskey, la classe ! - je pense à la contrebasse de charles mingus
traînant dans un coin de manhattan comme une nature morte de cézanne en noir
& blanc, le clochard céleste noir du jazz écorché vif sur un lit de
clous, viré de son loft par la mafia des agents immobiliers de Magic-City -
je pense à la révolution surréaliste transformée en hamburger fast-food & au
cri de ginsberg (bientôt ?) transformé en pet bourgeois - je pense
aux miroirs de ravel, à un vieux tube loufoque de Chagrin d'Amour à la
disco-gainsbar & au dernier concert de La Miroiterie ; aux bals des
travestis dada de la mi-carême de Magic-City & aux nuits d'errance de
débauche & d'ivresse à pigalle; aux cœurs-molotov qui explosent de tant de
passion ou si souvent pour ne pas savoir aimer;
aux vies qui meurent pour ne pas savoir vivre ou ne pas savoir mourir
avant de mourir; aux yeux de tulipe d'agen d'anna karina dans 'le petit soldat'
lâchant pendant une clope « un jour,
disait van gogh : nous prendrons la mort, pour aller dans une autre étoile »
("van gogh once said that death would take us to another star.") -
je pense aux shilins & aux bois de pierre de ma révolte, le son du vent
& le dernier tango du clown à jaramillo, & je ne pense plus à rien ;
j'en ai plus rien à dire, je ne sais plus rien - j'ai envie de danser, ou de
dormir, de briser le miroir, de tout oublier...
- finalement, je pense à toutes les fleurs que j'ai oublié
d'arroser & ça a toujours été comme ça...
henrik aeshna, 4 août 2016
* "so many feelings
/ pent up in here / left alone i'm with / the one i most fear /
i'm sick and
tired / of reasoning / just want to break out / shake off this skinâ€
« i can't escape myself », the sound, 1980